28 janvier 2019
Femme libérée
Texte écrit lors de mon atelier d’écriture.
Consigne : Finir un conte lu en séance.
Le Prince s’agenouille, son cœur bat, ses yeux s’écarquillent et son souffle se coupe. Il s’approche de Blanche, s’arrête un instant et contemple la beauté d’un corps, la douceur d’un visage, la grâce d’une bouche. Il se penche et lui dépose au doux baiser que le silence assourdissant de la forêt et de ses habitants met en relief.
Elle le regarde. Ses paupières s’ouvrent lentement, ses yeux bleus le découvrent, ses prunelles s’écarquilles et, dans un réflexe inattendu elle lui décoche un direct qui lui écrase le nez et fait immédiatement sortir une giclée de sang.
- Non mais qu’est-ce que tu fais toi ? Qu’est qui te prend à me rouler une galoche sans me demander mon avis ? T’as fumé du crack ou quoi ?
Super et tremblement dans la colonie.
- Et vous les fainéants à qui j’ai fait le ménage, la vaisselle et le repassage pendant des mois et des mois, vous les sept abrutis qui mangiez comme des porcs ce que je vous servais à chaque repas, ça ne vous gêne pas de le regarder me tripoter pendant que je dors ? Ça vous plait sans doute ?! Voyeurs !
- Mlle Neige, ne vous fâchez pas. Nous pensions que vous seriez heureuse de… de sortir de votre condition, voyez, c’est un Prince tout de même. Il est beau, riche et puissant. Vous serez heureux avec un Prince, vous…
- Riche sans doute, puissant de fait, c’est malheureux mais c’est sûrement vrai, quant à beau, c’est une question de point de vue !
- Heu, si quand même, je suis beau, j’ai des maitresses dans tout mon royaume.
- Bah non, vous n’êtes pas beau !
- Bah si !
- Bah non !
- Bah si !
- Bah non ! Et puis je m’en fous. Beau ou pas beau, je ne vous connais pas.
- Je suis le fils du Roi, bientôt tout le royaume sera mien et mon pouvoir s’étendra sur les milles forêt du pays, et …
- Et j’ai ceci, et j’ai cela ! Il ne suffit pas d’être riche pour être honnête ! Vous m’avez volé ce baisé ! Alors maintenant, dites-moi comment, avec votre royaume, vos pièces d’or et votre château vous allez me rembourser ?
- Si je vous ai volé un baisé, volez-m’en un à votre tour.
- Quel escroc ! Tu me voles, à mon insu, et maintenant tu me veux à ta botte ! A d’autres. J’en ai connu des lascars dans ton genre. Qu’est-ce que tu crois ? Que je m’appelle Blanche Neige pour ma pureté ?
- Et bien j’avoue que…
- Je m’appelle comme ça parce que je suis froide avec les mecs. Les grands comme les petits. Vous êtes tous des pompeurs de tétines, des renifleurs de culs, des sportifs du plumard !
- Que dites-vous ?
- Que dites-vous, que dites-vous ? Moi, c’est les filles que j’aime ! J’aime le parfum des brunes, la peau des blondes et les frisettes des rousses. Tu vois, tout Prince que tu es ? Tu ne t’es pas posé la question avant de m’embrasser, tu n’as pas cherché plus loin que le bout de ta queue, le loup ! Tu t’es jeté sur la première femme couchée, endormie ou pas, t’as cru que si je ne bougeais pas c’était parce que j’étais facile hein ? Avoue-le que tu m’as prise pour un morceau de beefsteak ? Avec toutes tes soi-disant maitresses, tu ne t’es pas demandé si, pour une fois, tu pouvais tomber sur un os !
- Et bien, en effet, je n’imaginais pas que..
- Bah voilà, tu imaginais mais tu n’imaginais pas ! Tu croyais mais tu ne pensais pas !
- C’est vrai que…
- Les bonhommes sont des mecs faciles. T’es rien qu’une mauviette, t’es bon qu’a te coucher devant le premier parfum de muguet, le premier coquelicot un peu fragile que tu croises et dès que tu tombes sur une rose bien rouge qui t’enfonce son aiguille sous la peau et qui te touche un nerf tu perds ton sang bleu d’abrutis couronné …
- Mlle Neige…
- Vos gueules les nains. Vous c’est la même chose. Vous ne pouviez pas vous passer de votre mère alors vous m’avez mis le grappin dessus. Mais c’est fini ! Terminé ! Basta la compagnie. Blanche Neige a grandi et elle s’en va vivre sa vie. Je vous laisse à vos rêves d’enfant ! Tiens, une idée : inventez une religion, mettez-y un barbu, une vierge et un traitre, ça devrait faire votre affaire pendant quelque temps.
Bye, chao, asta la vista !
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